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Légende

Marc-Alain Ouaknin © Ph. Matsas / Opale

Conférence inaugurale Golem! Avatars d’une légende d’argile

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Par Marc-Alain Ouaknin, philosophe, rabbin

Par Marc-Alain Ouaknin, philosophe, rabbin, producteur de l’émission Talmudiques sur France Culture

« Dans le texte biblique, la racine hébraïque "GLM", qui a donné le mot hébreu "golem", possède différents sens. Tout d’abord le sens de "plier", "rouler un vêtement" et, plus précisément, « rouler un manteau » (II Rois 2, 8). Par dissémination sémantique, le verbe "plier", "rouler en boule un vêtement", a donné un substantif désignant le "manteau" lui-même ou un "paquet de vêtements attachés ensemble" (Ézéchiel 27, 24). Et par un nouveau glissement, la racine "GLM" en vient à désigner toute chose roulée sur soi en une masse informe, d’où l’"embryon", perçu comme un petit corps pelotonné et roulé en boule, dans laquelle les différents membres sont difficilement perceptibles (Psaumes 139, 16).

Ce sens de masse informe va passer dans le Midrash pour signifier une motte de terre ou de glaise sans forme. D’où le nom donné à l’homme primordial fait de poussière et d’eau avant qu’il ne soit animé par le souffle de Dieu, qui lui offre du même coup la capacité de devenir une créature douée de parole. Il y a en effet une proximité étymologique entre les mots hébreux "adamah" ("terre") et "adam" ("homme").

La Mishna, dans le traité des Pères, comme dans le traité Kelim, va désigner par "golem" toute créature ou objet dont la fabrication n’est pas finie. Ainsi l’embryon se retrouve
"golem" pour cette seconde raison, en plus de la nature pelotonnée évoquée ci-dessus. Un outil en cours de fabrication sera également désigné comme "golem", de même qu’un enfant ou une personne n’ayant pas achevé son éducation ou sa formation.

Dans le Talmud de Babylone, le mot "golem" devient "glimah" en araméen, désignant à la fois le "manteau qui recouvre" et la "masse informe", l’un étant lié à l’autre, parce qu’en recouvrant toute la personne, il le fait ressembler à un golem, "une créature informe dont on n’aperçoit plus les membres et les différentes parties du corps".

"Glimah" porte aussi en filigrane le sens du verbe "rouler" ou "plier" que la racine "GLM" possède dans la Bible : en effet, c’est le "manteau" ou la "cape" qui recouvre tout le corps pendant la marche, protégeant de la pluie, du vent et de la poussière, et qui est roulé quand la personne veut s’asseoir afin que celle-ci retrouve la liberté de ses mouvements et, dans le cas du manteau d’apparat, afin de ne pas l’abîmer.

"Golem" dans le Talmud a également le sens d’"objet en cours de fabrication" et de créature artificielle animale ou humaine. C’est ce dernier sens qui va prévaloir jusqu’à aujourd’hui, souvent dans l’oubli ou l’ignorance des premiers sens que le mot eut à travers les âges et les textes. »

Marc-Alain Ouaknin, extrait de "Lettres du Golem, Fragile argile" pour le catalogue de l’exposition (mahJ/Hazan, 2017)

2017-03-08T19:30:00
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