Contrat de mariage (ketoubbah)
4. Les temps de la vie
Du berceau à la tombe, les grandes étapes de la vie juive sont scandées par des rites définis à la fois par des commandements religieux et des coutumes locales. Les usages évoluent dans le temps en fonction des sociétés dans lesquelles ils s’inscrivent.
La circoncision des garçons à l’âge de huit jours (brit milah) rappelle l’alliance d’Abraham avec Dieu dans la Bible. Elle est obligatoire mais peut être repoussée en cas de danger pour l’enfant. Si aucun équivalent n’existe pour les filles, la nomination du nouveau-né est souvent l’occasion de célébrer sa naissance.
À treize ans pour les garçons, douze ans pour les filles, l’enfant devient membre à part entière de la communauté en tant que bar ou bat mitsvah, littéralement « fils » ou « fille du commandement ». Mentionnée pour la première fois au XIIIe siècle, cette étape ne fait l’objet d’un véritable rituel qu’à partir du XIXe siècle. L’affaiblissement de la transmission impose un enseignement préparatoire et justifie la création de nouveaux rites. En France, dans les années 1840, une cérémonie collective « d’initiation religieuse » sanctionne ainsi, tant pour les filles que pour les garçons, la fin des études religieuses. Les célébrations individuelles avec lecture de la Torah et discours sont donc récentes. La place des filles varie aujourd’hui selon les communautés, de l’exclusion à l’égalité complète. La dimension festive de l’événement s’est fortement développée.
Considéré par la tradition comme la pierre angulaire de toute vie juive, le mariage consacre le commandement biblique « Croissez et multipliez ». Il est précédé par la remise à l’épouse d’un contrat (ketoubbah), initialement conçu pour protéger ses droits. Lors des bénédictions, les mariés sont placés sous un dais nuptial (houppah) symbolisant la protection divine. À la fin de la cérémonie, un verre est brisé en souvenir de la destruction du Temple.
L’inhumation du défunt est traditionnellement prise en charge par la communauté pour que la famille puisse se consacrer exclusivement à son deuil. Destinés à permettre l’expression du chagrin avant un retour progressif à la vie, ses rituels ont évolué, intégrant des prières pour l’élévation de l’âme du défunt, tel le Qaddish des orphelins apparu à l’époque médiévale et récité pendant un an pour un parent puis lors de chaque anniversaire de décès.
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Pour aller plus loin :
Le mariage
Marco Marcuola (Vérone, 1740 - Venise, 1793), Un mariage juif, Venise, vers 1780
Le mariage est la finalité de la création divine : il est dit dans le Talmud que, depuis que le monde est achevé, Dieu consacre son temps à former les couples. Dans la Bible, l’amour conjugal incarne la perfection sacrée et sert de métaphore à l’union entre Dieu et son peuple, entre Israël et la Torah. La cérémonie peut avoir lieu dans une maison privée, en plein air ou dans une synagogue. Dans sa forme rabbinique, la cérémonie comporte deux temps. Elle commence par la consécration appelée eroussin ou qiddoushin, où le fiancé prend épouse devant deux témoins et en présence de dix hommes ; pour sceller les qiddoushin, il lui remet soit de l’argent, soit un objet de valeur ou encore un document attestant sa volonté de l’épouser et déclare : « Voici tu m’es consacrée selon la loi de Moïse et d’Israël ». L’usage d’un anneau nuptial n’interviendra que très tard dans ce rituel ; on procède alors à la lecture de l’acte de mariage (ketoubbah), garantissant les droits de la femme en cas de divorce et de veuvage, qui est signé par l’époux et les témoins, avant que ne débute le mariage proprement dit (nissou’in). Les sept bénédictions (shev’a brakhot) sont ensuite récitées sous un dais (houppah), formant comme le toit d’une maison au-dessus des mariés. À l’issue de la cérémonie, le marié casse un verre en souvenir du Temple détruit ; le mariage se conclut par l’isolement du couple.
Le mariage est l’occasion de grandes réjouissances ; depuis l’Antiquité, musique et chants, danses et amusements accompagnent rituellement les étapes des festivités. Dans le monde ashkénaze, les habitudes se sont figées à la fin du Moyen Âge et n’ont été modifiées que tardivement sous l’influence du hassidisme. L’art d’orner les contrats connaît son apogée en Italie aux XVIIe et XVIIIe siècles.