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Stèle

Auch, France,
5e-7e siècle
Inv.
D.2018.01.001
ancien inv.
MAN 20320
Lapidaire
Stèle
Dimensions :
H. 19 - L. 24 - Ep. 11 cm
Calcaire gris
Dépôt du Musée d'Archéologie nationale

Pour toute demande de reproduction veuillez contacter la photothèque.

Historique
Acquise en 1873 par le musée d’Archéologie nationale, cette petite stèle a été découverte au milieu du XIXe siècle sur le site de Saint-Orens à Auch (Gers). Elle porte une inscription gravée sur six lignes, rédigée en latin, à l’exception de la dernière qui apparaît en caractères hébraïques.
Sur le plan épigraphique, on notera aussi l'usage de quelques caractères de type grec en place de caractères latins ( Δ pour D, Ȣ pour O, ¥ pour F).

Le mot en hébreu, "shalom" (paix), ainsi que les trois motifs l’accompagnant, un shofar – instrument à vent taillé dans une corne d’un bélier –, une menorah – chandelier à sept branches du sanctuaire du désert puis du Temple de Jérusalem – et un loulav – palme utilisée lors de la fête des cabanes ou Soukkot –, signalent de manière certaine un contexte juif. En revanche le sens de cette stèle a fait l’objet de débats jusqu’à nos jours selon l’interprétation de la deuxième ligne.

Dans la première hypothèse, il s’agirait de la dédicace du pavage (pelester) d’une synagogue, offert par un certain Bennid.
Dans la seconde, ce serait la stèle funéraire d’un nommé Peleger, « fils de Nid », l’usage de l’hébreu en place de « filius Nidi » confirmant sa judéité. Peleger – pour certains l’équivalent de Gerson – serait un nom grec, langue rare à l’époque carolingienne en dehors des communautés juives entretenant d’importants liens commerciaux avec l’Empire byzantin hellénophone. Cette épitaphe se rapprocherait de nombreux exemples italiens de l’Antiquité tardive, en latin ou en grec, sur lesquels on retrouve à la fois le mot shalom en hébreu et quelques symboles juifs comme le shofar, la menorah et le loulav.

Dans les deux cas, la stèle est l’œuvre d’un certain Jonas, nom typiquement juif. Quant à l’imprécation contre le mauvais œil, fréquente dans la culture populaire juive, elle dérive de plusieurs versets bibliques (Job, 12, 20, Proverbes, 30, 17...) et est reprise dans le Talmud (Berakhot, 20a).

Quelle que soit sa fonction, cette stèle constitue surtout un des très rares témoignages archéologiques – avec une stèle funéraire du VIIe siècle trouvée à Narbonne – de la continuité d’une présence juive en France méridionale de l’Antiquité au premier Moyen Âge. Si l’emploi d’une langue non juive, le latin ou le grec, la norme épigraphique de l’époque, est le signe d’une parfaite intégration, il rend particulièrement difficile leur identification. Il faudra ensuite attendre le XIIe siècle pour voir apparaître des inscriptions en hébreu, principalement funéraires.
Description
Bloc de calcaire rectangulaire gravé de six lignes de texte. Les cinq premières sont en latin (avec l'emploi de quelques caractères grecs), la sixième en hébreu.
Graffitis figurant un shofar (corne de bélier), une menorah (chandelier à sept branches), et un loulav (palme de la fête de Soukkot) dans le coin inférieur droit
Langue
Latin/ hébreu
Inscriptions
Sur six lignes :
« IN DEI NOMINE S[an]CT[o]
PELE[?]ER QUI [h]IC BENNID
D[eu]S ESTO CUM IPSOS OCOLI
INVIDIOSI CREPEN[t]. DED[i]T
DONUM IONA FECET
שלום »
Traduction
« Au saint Nom de Dieu
1) Le pavage qui [est] ici, Bennid - 2) Peleger qui [gît] ici, le fils de Nid
– Dieu soit avec lui et que les yeux
Envieux crèvent – 1) l’a offert – 2) par la grâce
1) En don – 2) De Dieu – Jonas l’a confectionné
Paix »
Publication
Reinach, Theodor, "inscription juive d'Auch" in REJ 19, 1889, p. 219-223
Kaufmann, David et Reinach, Theodor, "Nouvelles remarques sur l'inscription juive d'Auch" in REJ 20, 1890, p. 29-33
Nahon, Gérard, Inscriptions hébraïques et juives de France médiévale, 1986, n° 287, p. 334-335